Dans un contexte de forte reprise du marché du conseil et de très vive concurrence des cabinets pour recruter, les cas de démarchage en masse des équipes de consultants de cabinets concurrents se multiplient.
Ces démarches parfois désagréables s’expliquent par plusieurs problématiques mis en avant dans un sondage sur le conseil en management mené par l’institut de recherche londonien Source Global Research (Source : clic):
- Deux entreprises de conseil sur trois indiquent qu’elles sont « sous-staffées »
- Une sur cinq refuse des missions faute de consultants pour les réaliser
Comme en témoigne le taux moyen d’occupation de 70% des postes seniors que le secteur du conseil en stratégie et en management s’arrache (source : clic), la situation est complexe.
Ne disposant pas des effectifs suffisants pour staffer correctement leurs missions, les cabinets de conseil fonctionnent en surrégime. Cela accroît le malaise des équipes et démobilise les talents.
Et pourtant, la « sur sollicitation » des forces vives ne saurait être à elle seule la cause de leur désengagement. Pensons la question par analogie avec les militaires.
Le rythme effréné des opérations mobilise également à l’excès les militaires. Opérations extérieures sur tous les continents, opérations intérieures interminables (Sentinelle/Vigipirate), s’enchaînent sans arrêt depuis ces 20 dernières années.
Ils sont eux aussi en surrégime.
Mais que se passe-t-il dans la tête d’un soldat lorsqu’il apprend, parfois soudainement, un départ imminent en mission ?
Une dynamique incroyable se met en marche, sa vocation se réalise. Servir ! Servir son pays, servir aussi son chef, son unité.
Malgré la probable appréhension d’une aventure incertaine, la fatigue due au rythme d’activité soutenu ou les problèmes du quotidien qui ponctuent aussi la vie de ces hommes et femmes, une formidable énergie les mobilise.
Quels sont ces « boosters » de motivation qui permettent de tenir et de rester à bord ?
Remise de décoration au Commandant Philippe Kieffer suite au débarquement du 6 juin 1944
Le sens.
Certes des facteurs propres à la vocation militaire favorisent l’émergence d’un sens puissant: la part de rêve que l’on associe à l’aventure et la conscience de servir une juste cause.
Mais pour aller au-delà du seul effet moral, les procédures de commandement sont faites pour rappeler systématiquement le sens donné à la mission : le Pourquoi ?
Premier point de tous les ordres donnés, la « Situation » permet à tous les échelons de comprendre ce que l’on fait et pourquoi on le fait.
En opération, n’importe quel soldat connaît la mission de son N+5 (le général). Cela permet à chaque soldat de comprendre pourquoi il attend, souvent dans le froid ou sous la pluie, en conservant son moral et son énergie !
Il y a un sens à chaque situation. Encore faut-il le partager.
La confiance dans sa hiérarchie.
La confiance repose sur deux piliers : la légitimité naturelle issue d’une compétence reconnue (et non pas décrétée) et l’exemplarité.
– Qu’est-ce qui anime les hommes du capitaine de Bournazel qui en 1933, blessé une première fois lors de l’assaut d’un piton rocheux dans le djebel Saghro (Haut Atlas), repart à l’assaut à leur tête ?
– Qu’est-ce qui anime les 177 commandos du commandant Kieffer qui débarquent sur les plages de Normandie le 6 juin 1944 à la suite de leur chef ?
– Qu’est-ce qui anime les marsouins du lieutenant Bruno H au moment de monter à l’assaut baïonnette au canon sur le pont de Vrbanja à Sarajevo en 1995 ?
C’est l’exemplarité de leur chef qui s’engage en premier dans la difficulté et partage leur condition !
Les unités les plus soudées sont celles où, quel que soit le grade, le confort est le même, le destin est partagé. Le colonel parachutiste passe la porte de l’avion avec le même barda que le simple soldat. Cela crée des liens indéfectibles gages d’une confiance renforcée avec la hiérarchie.
Le sentiment d’appartenance.
Le sentiment d’appartenance solidarise les hommes et les femmes engagés autour d’une vocation commune.
De tout temps, les soldats se sont unis et encouragés autour de bannières et de chants martiaux. Les militaires des temps modernes perpétuent ces traditions à l’occasion d’événements collectifs marquants comme la cérémonie des couleurs, la présentation au drapeau des jeunes arrivants, la marche aux fourragères, la visite de la salle de tradition de l’unité qui évoque le passé glorieux des anciens.
Ces moments “initiatiques” particuliers contribuent au développement de valeurs d’appartenance très fortes qui légitiment par la suite l’engagement individuel et le sacrifice du confort.
Le lien tissé avec les « anciens » au moment de l’intégration dans la nouvelle unité, le parrainage, la prise en charge par un “président de catégorie” (un “ancien” nommé pour ses qualités humaines qui porte le message de sa catégorie Off/SOff/militaire du rang auprès de la hiérarchie), sont autant d’efforts pour rappeler au nouvel arrivant qu’il intègre un collectif aussi soudé qu’une famille.
Cette cohésion forgée autour du collectif et de son patrimoine historique sera un facteur clé de motivation au moment le plus dur, en phase de « surrégime ».
La reconnaissance.
Du sens pour motiver, de la confiance pour suivre, la fierté d’une appartenance pour durer mais aussi la reconnaissance du travail accompli pour fidéliser.
Bien loin des systèmes de primes et de rémunérations variables, la reconnaissance dans les armées revêt plusieurs aspects.
– Elle peut être collective par la remise de décoration sur le drapeau du régiment, la lecture devant les troupes d’une lettre de félicitation pour une compagnie.
– Elle est surtout individuelle. Chaque situation remarquable, moment de bravoure, réussite très spécifique donne lieu à l’attribution d’une distinction selon le niveau de performance et le contexte. Du témoignage de satisfaction remis en main propre ou lu devant les troupes (les collègues !) à la remise d’une décoration, c’est avec très grande fierté que le récipiendaire reçoit la distinction puis la porte à l’occasion des moments officiels.
Cette reconnaissance ne coûte pas cher à l’Institution militaire mais, inscrite dans une tradition très ancrée, rapporte beaucoup en termes d’adhésion et de cohésion.
De véritables responsabilités.
Le principe de “subsidiarité” autrement dit de “délégation” confère une véritable autonomie dans l’action à tous les échelons. Il pose le principe que la responsabilité d’une action doit être allouée à la plus petite entité capable de résoudre le problème elle-même. Il établit un véritable lien de confiance, gage de réactivité et d’engagement.
Le chef, manager sincèrement « autonome » pour la réalisation de sa mission, gère lui-même son surrégime, l’organise et ajuste son engagement pour réaliser la mission.
Le micro-management n’est plus possible, pas permis.
Le courage…. de décider et d’y aller.
Il n’y pas de situation militaire en opération qui se déroule en respectant 100% du plan établi. De nombreux facteurs interviennent pour contraindre le chef à décider « en cours d’action ».
– Au mieux, la situation appelle une procédure prévue de gestion de « cas non conformes ».
– Au pire, le salut de la mission et le niveau de risque engagé par les soldats dépend de la capacité du chef à appréhender la situation et à décider sur le champ d’une nouvelle option.
Aucune décision n’est sans risque et le louvoiement n’est pas permis. Le chef/manager est seul face à l’enjeu. Il est seul avec son courage pour assumer les conséquences de SA décision. Observé par son équipe, il sait que son aptitude à décider sera primordiale pour rassurer, motiver et maintenir ses hommes « sur le pont ».
– Le Chef est celui qui prend tout en charge. Il dit : « J’ai été battu ». Il ne dit pas « Mes soldats ont été battus » Antoine de Saint Exupéry – Pilote de Guerre –
Ces “boosters » de motivation sont essentiels pour tenir et rester motivé dans les situations critiques.
Voici 6 points de questionnement tirés des pratiques militaires qui vous permettront d’évaluer les actions que vous menez :
- Partagez-vous la vision de votre entreprise à vos équipes ?
- Prenez-vous les décisions pas toujours faciles mais attendues par vos équipes ?
- Développez-vous l’esprit de corps qui fédère autour de vos succès, de vos valeurs ?
- Gardez-vous le contact avec le terrain en opérant des petites routines managériales qui encouragent et rassurent : Le briefing café du lundi matin, la célébration d’un succès commercial ou le dépassement d’un objectif ambitieux ?
- Accordez-vous le droit de se tromper pour libérer la capacité d’initiative et l’autonomie ?
- Etes-vous sensibles aux signaux faibles émis par vos collaborateurs ou vos collègues ?
Nous sommes convaincus que l’érosion des effectifs n’est pas une fatalité et qu’un leadership renforcé de pratiques managériales « combat proven » facilite la rétention des talents et par voie de conséquence la diminution du surrégime des équipes.
A l’heure du plein emploi des cadres, c’est un enjeu stratégique pour les cabinets de conseil qui doivent disposer des effectifs permettant d’honorer les missions et développer le business.
Nos convictions
Chez [Pépite.], nous avons la conviction que l’adhésion d’une équipe au projet d’entreprise repose également sur ce socle : respect mutuel, communication et exemplarité. Porté par le sommet de la hiérarchie et relayé de niveau en niveau, il renforce le sentiment d’appartenance, élément moteur de l’engagement.
En pratique, bon nombre de postures et de méthodes de management militaires qui confortent le leadership peuvent aisément se transposer dans l’environnement professionnel des sociétés de conseil.
Et maintenant ?
Chez [Pépite.], notre ambition est de partager les meilleures pratiques des Armées pour maintenir « embarquées » les équipes de nos clients malgré l’incertitude et l’inconfort du quotidien en opération.
Pour ce faire, nous avons créé le programme [Amiral.] animé par des Mentors aguerris sur des postes de direction/dirigeant en entreprise après une première carrière de Chefs militaires. Pour en savoir plus :